Dr Andras HOZNEK praticien hospitalier, professeur associé au Collège de Médecine des Hôpitaux de Paris
Selon leur aspect radiologique, il existe deux types de calculs : les calculs radio-transparents et les calculs radio-opaques. Les premiers sont constitués dans la majorité des cas d'acide urique et peuvent donc être dissouts en alcalinisant les urines par un traitement médical. Les calculs radio-opaques sont constitués d'oxalate ou de phosphate de calcium, plus rarement de struvite (phosphato-ammoniaco-magnésien).
Autrement dit, un traitement médical peut être envisagé, en monothérapie ou associé à un geste chirurgical, uniquement dans le cas de calculs d'acide urique.
Faut-il traiter chirurgicalement tous les calculs, quelque soit leur taille ?
Comme il ne faut pas pratiquer une césarienne chez toutes les femmes enceintes, tous les calculs de voies urinaires ne nécessitent pas obligatoirement un traitement chirurgical. Le calibre de l'uretère est d'environ 4 millimètres, donc les calculs dont le diamètre est inférieur peuvent s'éliminer spontanément dans la majorité des cas (environ 95% des cas) par les voies naturelles, certes, quelquefois au prix de quelques coliques néphrétiques. Au-delà de 7 millimètres, la possibilité de cette élimination est très peu probable. Bien entendu, en cas d'infection associé tel que la pyélonéphrite sur obstacle, le traitement conservateur est proscrit.
Faut-il traiter les calculs caliciels asymptomatiques ?
Comme nous l'avons vu, en absence de complications, les calculs caliciels de moins de 5 millimètre ne nécessitent généralement pas de traitement chirurgical. Cependant, pour les calculs de plus gros volume, habituellement nous proposons un traitement, car des études de suivi à long terme ont montré, qu'ils finissent par se compliquer dans une proportion non négligeable des cas, sous forme de colique néphrétique ou des infections pouvant aller jusqu'à la septicémie. Ainsi, des études observationnelles ont montré, que sur une période de 5 ans, 1/3 des patients devient symptomatique et doit avoir une intervention chirurgicale en urgence, quelque fois dans des situations mettant en jeu le pronostic vital.
Quel possibilité de traitement chirurgical, pour les calculs de plus que 5 mm ?
La première méthode consiste à transformer ces calculs en de petits fragments millimétriques qui vont pouvoir s'éliminer spontanément. On parle alors de « lithotripsie » qui peut être extra ou endo-corporelle.
Ces méthodes consistent à passer un endoscope par les voies naturelles, jusqu' au calcul. Puis, nous utilisons des outils de fragmentation et des outils d'extraction pour détruire et retirer le calcul. Contrairement à la lithotripsie, l'urétéroscopie nécessite une anesthésie générale.
Les urétéroscopes rigides sont utilisés pour les calculs de l'uretère.
Pour les calculs pyéliques et les calculs caliciels, nous utilisons l'urétéro-rénoscope flexible. Cet instrument d'environ 70 cm de longeur a un diamètre de 8-9 Ch environ, la flexion déflexion de l'instrument est de 270 degrés dans les deux sens. Concernant le système optique, il existe deux générations. Les urétéroscopes de première génération dites « fibrés » utilisent la technologie des fibres optiques aussi bien pour la vision, que la transmission de la lumière. L'inconvénient est leur fragilité et la qualité de vue assez approximative, avec des artefacts à type de « nid d'abeille ». Les urétéroscopes de deuxième génération sont entièrement numériques. Une microcaméra est disposé au bout de l'instrument (chip on the tip) et l'éclairage est assuré par un LED qui est également à l'extrémité de l'uréteroscope. Actuellement, ces urétéroscopes de deuxième génération offrent des images d'une fidélité exceptionnelle avec une vision micro-chirurgicale.
Une fois le calcul visualisé, la prochaine étape est la fragmentation ou la vaporisation. Pour cela,actuellement, la méthode de référence est le laser holmium. Mises au contact du calcul, l'efficacité des fibres laser est inégalable. Néanmoins, la taille des fibres est réduite, c'est-à-dire de 200 à 365µm. Par conséquent, la fragmentation du calcul (ou sa vaporisation) nécessite environ une heure par centimètre de calcul. Ainsi, pour un calcul de 3 cm de diamètre, il faut compter un temps d'occupation du bloc opératoire d'environ 4 heures.
On dispose également de différents outils d'extraction, tel que les paniers de Dormia. Différents diamètres existent, en fonction du type et du calibre de l'urétérosocpe ou de l'urétéro-rénoscope. La taille des fragments qu'on peut retirer à l'aide de ces outils est limité par le calibre de l'uretère. Autrement dit, pour les calculs volumineux, une fois fragmentés, plusieurs aller-retour sont nécessaires. Pour faciliter ces aller-retours, nous utilisons couramment dans le cadre de l'urétéro-rénoscopie flexible des gaines d'accès urétérales.
Au total, l'urétéroscopie et l'urétéro-rénoscopie flexible donne des résultats plus parfaits et plus reproductibles, plus prévisibles que la lithotripsie extracorporelle. Le principal obstacle à la généralisation de la technique de l'urétéro-rénoscopie flexible est pour l'instant la fragilité et le coût de l'instrument : la durée de vie d'un urétéroscope de 10.000 Euros est d'environ 20 à 50 utilisations. La difficulté réside donc de mettre en place une infrastructure et une organisation, où le matériel est manipulé de façon professionnelle pour optimiser sa durée de vie. Par ailleurs, comme nous l'avons vu, le temps opératoire est proportionnel à la taille du calcul, au-delà d'une certaine limite, l'efficacité est discutable.
Comme l'urétéroscopie se fait par les voies naturelles, il est claire, que la taille maximale des fragments qu'on peut extraire ne dépasse pas 4-5 millimètres. Si on veut retirer de plus gros fragments, il existe une autre méthode, dont le principe est la création d'un tunnel transcutanée artificiel. Il s'agit de la chirurgie percutanée du rein. Cette technique permet de retirer des volumineux calculs, de plusieurs centimètres en une seule intervention avec un taux de succès total de l'ordre de 80% dans des mains expérimentés. Néanmoins, la courbe d'apprentissage est longue, on considère, qu'il faut au moins 50 interventions pour être à l'aise.
Classiquement, cette intervention se faisait en deux temps et nécessitait deux installations. La montée de sonde urétérale en position de lithotomie. Le deuxième temps, la chirurgie percutanée proprement dite se déroule en position de décubitus ventral. Cette deuxième installation a des inconvénients évidents sur le plan de l'anesthésie.
La chirurgie percutanée a longtemps été et continue d'être considérée comme la plus invasive des méthodes endo-urologiques. Il existe un risque hémorragique, de fistule urinaire, ou de plaie d'organes avoisinantes, tel que le colon ou la plèvre.
Mais parallèlement à l'évolution de l'urétéroscopie rigide et flexible, un important progrès au eu aussi lieu dans le domaine de la chirurgie percutanée.
Tout d'abord, la planification chirurgicale se base actuellement sur les données de la tomodensitométrie et la ponction se fait sous contrôle échographique. Il est donc parfaitement possible d'éviter tout risque de plaie digestive.
D'autre part, la création du tunnel se fait aussi de façon moins traumatisante, en utilisant des ballons de dilatation. Avec une bonne technique de ponction et une dilatation atraumatique, le risque d'hémorragie est quasi nulle.
Une autre modification fondamentale est une nouvelle technique d'installation, en position de lithotomie modifiée avec la région lombaire du coté du calcul surelevée. (Position de Valdivia-Galdakao). Cette nouvelle installation permet d'avoir un accès simultané antérograde (néphrolithotomie percutanée) et rétrograde (urétéro-rénoscopie flexible) aux voies urinaires. On parle de « chirurgie intrarénale par endoscopie combinée » (ECIRS : Endoscopic Combined Intrarenal Surgery).
L'ensemble de ces modifications explique, qu'aujourd'hui, la chirurgie percutanée reste toujours d'actualité. La morbidité est réduite grâce aux innovations techniques, les durées d'hospitalisation ne dépassent pas 2-3 jours dans la majorité des cas. Cette méthode permet de retirer les calculs les plus volumineux, le plus souvent en un seul temps opératoire.
Les traitements qu'on vient de mentionner, à savoir la lithotripsie extracorporelle, l'urétéro-rénoscopie rigide et flexible et la néphrolithotomie percutanée, ne sont pas en compétition. Au contraire, dans la plupart des cas, ils sont complémentaires et leur utilisation doit être façonné au cas par cas en tenant compte des particularités des calculs et des patients. Néanmoins, l'ensemble de ces techniques n'est disponible que dans des centres spécialisés : les « stone centers ». En effet, comme nous l'avons évoqué, la technique de l'urétéro-rénoscopie flexible demande une organisation et une infrastructure spécifique, il en est de même pour la chirurgie percutanée : le savoir faire ne peut être acquis et maintenu que dans des centres à recrutement important.
Les méthodes endo-urologiques s'adressent dans la majorité des cas à des voies urinaires indemnes d'obstacle en aval du calcul. Si il existe une anomalie anatomique à corriger, tel qu'un syndrome de jonction, bien entendu, celle-ci se fera par voie chirurgicale. Dans ce domaine, la chirurgie laparoscopique et robotique prend de plus en plus d'importance.
Comme il s'agit d'une pathologie récidivante, il est essentiel d'établir une stratégie de prévention des récidives. Dans ce cadre, il est essentiel de réaliser un bilan éthioloque. L'élément clef, est l'analyse du calcul par spectrophotométrie infra-rouge et la réalisation d'un bilan phosophocalcique de première intention. Dans les cas les plus complexes, une bilan en hôpital de jour dans des services d'exploration fonctionnel spécialisés est nécessaire.